Promeneur en vedette : La femme aux papillons
Promeneur en vedette : La femme aux papillons virevoltants – Celina Thibault
Mise en garde/traumavertissement : références à des abus physiques et à des naissances prématurées.
Celina Thibault était bénévole au sein de la section de Calgary de la Fondation canadienne du foie depuis plus de 15 ans lorsque son parcours de santé du foie a commencé.
En 2004, Celina a appris qu’elle était atteinte de cholangite biliaire primitive (CBP), mais son parcours pour obtenir ce diagnostic a été semé d’embûches.
L’année précédente, Celina s’était sentie fatiguée et avait des nausées. Elle avait consulté son médecin, pensant qu’elle était peut-être enceinte. Comme son test de grossesse était négatif, son médecin lui avait conseillé de réduire sa consommation d’alcool et l’avait renvoyée chez elle.
En tant que femme crie, Celina s’était sentie offensée et frustrée que le médecin présume qu’elle consommait beaucoup d’alcool. Celina buvait rarement, un verre de vin toutes les deux semaines tout au plus, et elle savait que ses consommations occasionnelles n’étaient probablement pas à l’origine de ses nausées et de son épuisement. Son expérience l’avait rendue méfiante à l’égard des médecins, et Celina avait dû surmonter ses problèmes sans aucune aide.
Un an plus tard, alors que la santé de Celina continuait à se détériorer, elle avait remarqué qu’elle avait de nouvelles taches étranges autour des yeux (qui étaient en fait des dépôts de cholestérol). Elle avait décidé de chercher un nouveau médecin. La première question qu’on lui avait posée concernait sa consommation d’alcool. Après avoir fait remarquer qu’elle ne consommait pas beaucoup d’alcool, le médecin l’a envoyée passer une série d’examens interminable : des examens de dépistage du cancer et des analyses de sang pour dépister l’hépatite et le VIH. Après tous ses examens, Celina a finalement été aiguillée vers un spécialiste du foie.
Après d’autres examens, Celina a appris qu’elle était atteinte de cholangite biliaire primitive (CBP), une maladie chronique du foie dans laquelle le système immunitaire attaque le foie causant des lésions lentes et progressives aux voies biliaires. Alors qu’on lui avait d’abord dit que sa CBP n’était pas trop grave, Celina a atteint le stade quatre de l’insuffisance hépatique au bout de quatre ans et elle a été inscrite sur une liste d’attente pour une greffe.
Celina a dû attendre longtemps avant de recevoir un foie, attente d’autant longue qu’elle menait une vie difficile.
Celina était engagée dans une relation violente et, alors qu’elle était inscrite sur la liste d’attente pour une greffe, elle est tombée enceinte, ce qui est très rare chez les patientes atteintes de CBP évolutive. La grossesse de Celina a été extrêmement difficile, aussi bien pour elle que pour son bébé. Sa fille est née prématurément avec un poids de 4 livres et 4 onces, mais en bonne santé.
Pendant sa césarienne, Celina a demandé au médecin de pratiquer une ligature des trompes, mais en raison d’une hémorragie extrême, cette intervention n’a pas pu être réalisée. Après l’accouchement, le médecin a dit à Celina que ses organes étaient défaillants, qu’elle était en mauvaise santé, et qu’une autre grossesse était extrêmement improbable, voire impossible.
Lorsque sa fille n’avait que deux mois, Celina a subi une plasmaphérèse, une procédure au cours de laquelle la partie liquide du sang, ou plasma, est séparée des cellules sanguines. Après trois mois de plasmaphérèses, elle a appris qu’elle était en fait à nouveau enceinte.
Les médecins l’ont prévenue que poursuivre sa grossesse était dangereux, tant pour elle que pour son bébé, mais Celina était catégorique : elle ne voulait pas mettre fin à sa grossesse.
Celina en était là : enceinte, atteinte d’une maladie du foie à un stade avancé et en couple avec un partenaire abusif.
Le fils de Celina est né prématurément, pesant à peine deux livres à la naissance. C’était un battant, et il était en bonne santé, ce qui n’était pas le cas de Celina. Celina a attendu son nouveau foie pendant encore deux ans et demi.
Un jour, Celina a été attaquée par son conjoint. En 2012, elle a décidé que ce serait la dernière fois. Elle a rompu ses liens avec lui et le réseau social qui lui était lié. Ce choix courageux l’a laissée seule, incroyablement malade, avec deux jeunes enfants, et sans aucun soutien.
Pendant les mois qui ont suivi, Celina a été admise à l’hôpital pour une durée indéterminée. Sa mère, la seule personne disponible pour la soutenir, a déménagé chez Celina pour s’occuper de ses enfants. C’est à cette période que le médecin de Celina a organisé une réunion avec Celina, ses enfants, ses beaux-enfants et sa mère : Celina avait besoin d’une greffe de foie, ou elle allait mourir. Celina a dû prendre des décisions difficiles et commencer à organiser une vie pour ses enfants sans elle.
Mais l’histoire de Celina ne s’est pas arrêtée là. Ce n’était qu’un début.
Le 27 juillet 2012, Celina a reçu sa greffe de foie. Le 27 juillet est le jour de son anniversaire. Le 27 juillet, elle a une seconde chance.
Cette seconde chance l’a amenée à renouer avec ses racines et sa communauté autochtone. Elle a commencé à participer à des sudations, à assister à des pow-wow et à jouer du tambour. Ces expériences et le rétablissement de ses liens avec sa communauté ainsi que ses traditions et ses pratiques ont été extrêmement bénéfiques, lui donnant un nouveau souffle et un nouveau sens dans la vie. Elle compte même apprendre le cri.
La maladie de Celina, qui l’a entraînée dans la période la plus difficile de sa vie, est aussi ce qui l’a rendue plus forte, plus courageuse, et l’a rapprochée de sa communauté et de sa famille.
« Je suis venue ici pour tirer des leçons de mon expérience et les mettre en pratique dans ma prochaine vie », dit Celina.
Celina avait commencé à faire du bénévolat auprès de la Fondation canadienne du foie avant même de recevoir sa greffe. Elle fait partie de leurs premiers bénévoles. Dès qu’elle a appris que sa maladie était liée au foie, elle a voulu participer aux efforts de sensibilisation.
« On me jugeait en fonction de ma consommation d’alcool chaque fois que j’étais malade et que je consultais un médecin. « Ce stéréotype horrible m’a mise en colère », dit Celina. « Je voulais sensibiliser les gens à la CBP et lutter contre la stigmatisation des maladies du foie. »
Celina participe activement à la promenade Faites marcher votre foie depuis plusieurs années. Cette année, sa campagne de collecte de fonds s’intitule « Butterfly Dancing Woman » (la femme aux papillons virevoltants), le nom autochtone que lui a donné un aîné de sa communauté lors d’une cérémonie de sudation.
Ce que son aîné ne savait pas, c’est que quelques jours seulement avant la cérémonie de sudation, Celina était partie en randonnée seule et avait marché par mégarde dans un nid de papillons. C’est alors que des centaines de papillons s’étaient mis à virevolter autour d’elle. Elle voulait absolument immortaliser ce moment, mais elle n’avait pas réussi à prendre une photo nette des papillons qui volaient à toute allure. Mais aussi soudainement qu’elle était entrée dans ce sublime chaos, un papillon s’était arrêté et avait attendu que Celina le prenne en photo.
Récemment, la CBP de Celina est revenue au galop. Elle a appris que chez les femmes autochtones, la CBP revenait souvent, et avec violence.
C’est pour cela qu’elle participe à la promenade Faites marcher votre foie. Elle veut sensibiliser le public et récolter des fonds pour la recherche. Elle veut soutenir le travail effectué pour étudier et, espérons-le, guérir un jour les maladies du foie comme la CBP.
« C’est magnifique de voir tout le monde se rassembler autour d’une même cause », dit Celina à propos de la promenade Faites marcher votre foie. « Nous voulons tous vivre. Chacun de nous veut voir l’autre gagner. »